Lettre publiée dans Le Journal de Montréal
Que ce soit à la suite d’une fausse couche, d’un décès in utéro, d’une interruption de grossesse ou d’un décès peu après la naissance, la perte d’un bébé est une épreuve difficile pour celles et ceux qui la vivent. Les parents affectés par ce deuil ne perdent pas seulement un enfant, mais également tout le chemin de vie projeté avec lui. Comme toute autre forme de deuil, le deuil périnatal peut être accompagné d’émotions intenses et douloureuses, et celles-ci peuvent parfois être difficiles à comprendre pour les proches.
Au Québec, environ une grossesse sur cinq se termine par une fausse couche, ce qui en fait le type de décès périnatal le plus fréquent. Pourtant, le sujet demeure encore tabou. La Journée mondiale de sensibilisation au deuil périnatal, qui a lieu le 15 octobre, est une bonne occasion pour tendre la main aux milliers de parents touchés chaque année par le décès d’un bébé, pour leur donner une voix, afin qu’ils soient entendus et reconnus.
Un deuil complexe
Tous peuvent vivre un deuil, sans égard au nombre de semaines de grossesse ou à l’âge du bébé, qu’il s’agisse d’une grossesse désirée ou non. Certains auront besoin d’être accompagnés pour traverser cette épreuve et des ressources existent pour le faire. Malheureusement, celles-ci demeurent encore trop peu connues.
Le processus de deuil que vivent les parents est propre à chacun, mais est toujours complexe. À l’intérieur même du couple, les deux parents peuvent éprouver des sentiments différents. Les mères, qui ont porté le bébé, ressentent souvent un important sentiment de vide, et parfois même d’échec ou de culpabilité. De leur côté, les pères ou les conjoint.es ressentent souvent une grande tristesse assortie d’un sentiment d’impuissance. Cependant, tous deux doivent apprendre à vivre en trouvant la place symbolique que prendra leur défunt bébé sans être à leurs côtés.
L’importance des ressources de soutien
L’entourage des personnes en deuil d’un bébé n’est pas toujours bien outillé pour les soutenir dans cette épreuve. Plusieurs organismes communautaires répartis à travers la province, comme les Centres de ressources périnatales (CRP), ont développé des services spécifiques et gratuits pour accompagner les parents qui traversent ou ont traversé un deuil périnatal. Généralement, il s’agit de groupes de soutien qui permettent de briser l’isolement, d’échanger avec d’autres parents endeuillés, d’être compris et rassurés et de mieux connaître le processus de deuil. Le soutien offert prend également la forme de suivi individuel et familial personnalisé et de services de « marrainage » (jumelage à un parent ayant vécu un deuil périnatal). On retrouve aussi l’organisation d’activités spéciales pour souligner le bref passage du bébé dans leur vie. Par exemple, une marche lumineuse dédiée aux bébés partis trop tôt.
Après un décès périnatal, la perspective d’une nouvelle grossesse peut être angoissante pour les parents. Lorsqu’une nouvelle grossesse se présente, diverses émotions et inquiétudes peuvent se manifester. Là aussi, les groupes de soutien, les suivis individuel et familial et le marrainage permettent d’accompagner les parents dans leur cheminement.
Le milieu communautaire démontre encore une fois son importance, son agilité, sa capacité d’innovation pour répondre aux besoins des familles et sa complémentarité avec le système de santé. Par son offre qui se veut accessible et personnalisée, chaque parent y trouve sa place. Les services sont là pour tous, il ne faut donc pas hésiter à les utiliser ou à les demander!
Ne serait-il pas merveilleux que l’ensemble de l’expérience de la parentalité puisse être abordée sans tabou et en toute franchise, avec ses joies comme avec ses moments difficiles?
Marie-Claude Dufour
Directrice générale du Réseau des Centres de ressources périnatales du Québec (RCRPQ)